Dans un dossier de divorce, le Juge aux Affaires Familiales a, en application des dispositions de l'article 255 10° du Code Civil, désigné un Notaire en qualité d'expert.
Ensuite, dans le cadre de la procédure au fond, l'épouse a demandé une prestation compensatoire ainsi que le divorce aux torts exclusifs de son mari.
De son côté, l'époux a sollicité le rejet du rapport d'expertise établi par le Notaire, considérant que ce dernier n'avait pas fait preuve d'impartialité.
Dans son arrêt, la Cour d'Appel a :
- Annulé le rapport d'expertise considérant que le Notaire n'avait pas été impartial;
- Prononcé le divorce aux torts exclusifs du mari;
- Sursis à statuer sur la demande de prestation compensatoire de l'épouse;
- Ordonné une mesure d'expertise ayant pour objectif d'établir un projet de liquidation du régime matrimonial et de former des lots.
Dans un arrêt en date du 15 novembre 2017, la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation (n°16-25.700) a cassé l'arrêt de la Cour d'Appel en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise pour défaut d'impartialité de l'expert.
La Cour de Cassation a ainsi retenu :
"Vu les articles 270 et 271 du Code Civil
Attendu qu'à défaut de surseoir à statuer sur le prononcé du divorce, le Juge ne peut ordonner une mesure d'instruction relative à la prestation compensatoire, sans au préalable, constater une disparité dans les conditions de vie respectives des époux créée par la rupture du mariage (...)".
Cela implique que, le Juge, quand il est saisi d'une demande de prestation compensatoire, dans le cadre d'un divorce, doit, lorsqu'il a un doute sur le principe même de l'existence d'une prestation compensatoire surseoir à statuer sur le divorce lui-même dans l'attente du résultat des mesures d'investigation lui permettant de récolter les éléments nécessaires pour fixer le montant de ladite prestation compensatoire.
La Cour de Cassation applique par cette décision le principe bien connu dans notre droit de l'indivisibilité entre le prononcé de divorce et le prononcé de la prestation compensatoire (Cass Civ 2ème 04 mars 1998, n°95-10.729; Cass Civ 1ère 19 octobre 2004, n°03-11.699).
Le Juge saisi d'une demande de prestation compensatoire devra donc impérativement vérifier si l'incertitude repose sur le principe même de l'octroi de la prestation compensatoire ou si elle repose uniquement sur son montant.
Ainsi, lorsque le Juge prononce le divorce, il doit se prononcer par la même décision sur le principe de l'octroi d'une prestation compensatoire et ne peut surseoir à statuer que sur la question du montant.
Si le Juge a un doute quant au bien fondé de l'attribution de la prestation compensatoire et qu'il estime qu'une mesure d'investigation complémentaire est nécessaire, il doit alors également surseoir à statuer sur le prononcé même du divorce.